
Une image devenue célèbre (La course au bonheur, film d'Henry Brandt)
Rien n’étant vraiment planifié pour célébrer cet anniversaire, l’idée a germé petit à petit dans l’esprit du nouveau directeur des lieux, qui a fini par lancer son projet fin 2013. Un pari osé, sachant que le vernissage était prévu jour pour jour 50 ans après celui de l’Expo 64, soit le 29 avril. C’est donc en très peu de temps que le théâtre s’est métamorphosé pour retrouver son aspect des années 1960 – notons au passage la réédition du tabouret de Max Bill – et accueillir les nombreuses archives mises à disposition par la Cinémathèque suisse ou la RTS.
Divisée en huit secteurs, l’exposition revient à la fois sur les points forts de l’événement de 1964 et sur le combat de Charles Apothéloz pour conserver le théâtre. La section 7, « La naissance d’un théâtre » revient donc sur la genèse de ce qui est devenu aujourd’hui le Théâtre de Vidy.

Le port de l'expo, qui a inspiré le décor de l'émission de la RTS (Jean-Michel Ammon, notrehistoire.ch)
Une vision critique et des questions actuelles
Mais le but n’était ni de parler uniquement du théâtre ni de faire l’apologie d’un temps passé. En ressuscitant certains éléments bien précis, l’exposition de 2014 soulève des questionnements très actuels qui posaient déjà problème en 1964. Ainsi, les films d’Henri Brandt regroupés sous le titre « La Suisse s’interroge » sont visibles en intégralité dans le foyer du théâtre, qui a déménagé sa billetterie afin de constituer une véritable black box pour l’occasion. Il y est notamment question du statut des travailleurs étrangers en Suisse…
Il est par ailleurs à nouveau possible de répondre au fameux questionnaire de Gulliver intitulé « Un jour en Suisse ». Celui-ci, imaginé par Charles Apothéloz, avait pour but de dresser un portrait collectif des citoyens suisses à travers plusieurs questions à fort potentiel politique. Parmi elles, beaucoup ont été supprimées ou réécrites par le délégué du Conseil fédéral, et surtout les résultats du sondage, qui devaient être publiés lors de l’Expo, ont été censurés. Un exemple ?
« A ton avis, peut-on être un « bon Suisse » et…
… naturalisé ?
… ne jamais voter ?
… ne se lever qu’à 9h du matin ?
… se déclarer sans confession ?
… avoir une double vie ?
… ne parler qu’une des quatre langues nationales ?
… dépenser sans compter ?
… ne pas être un bon soldat ?
… discuter les valeurs traditionnelles ? »
L’Expo 64 a été un événement marquant, non seulement à l’échelle nationale mais aussi dans le reste du monde. Cependant, l’exposition proposée dans le cadre du Théâtre de Vidy se veut également critique, et dévoile une réalité pas toujours très rose derrière cette tendance à l’idéalisation d’un passé perdu et attirant, renforcé par l’effet de mode actuel autour des sixties. L’émission de la RTS tournée lors du vernissage d’hier et diffusée ce soir à 20h10 soulève donc une question importante : C’était mieux avant ?
Quelques liens utiles
- Toutes les infos sur l’exposition de Vidy
- « Point de Suisse », projet d’un collectif d’artistes faisant revivre le questionnaire Gulliver
- Liste des événements organisés en parallèle par des institutions diverses comme l’Université de Lausanne, l’EPFL, la Cinémathèque Suisse, les TL ou le 24 heures.

Image de Une: la cour des arts devant l'actuel Théâtre de Vidy, en 1964 (photo de Mireille Diggelmann-Golay, notrehistoire.ch)